Deir El Qamar, le « Couvent de la lune », s’est longtemps appelé “Beit Sapharo”, la « Maison de la lune ». Le croissant de lune qui domine la croix gravée sur l’ancien portail de l’église Notre-Dame-du-Tell, est un croissant de lune – et non pas un symbole musulman- auquel la ville devrait son nom, comme semble l’attester une stèle en provenance du temple païen découverte après le tremblement de terre de 1956.
Les habitants de Deir El Qamar, majoritairement chrétiens, conservent aujourd’hui une certaine fierté du passé glorieux de leur ville, dont les émirs Maan firent leur capitale. Ils y construisirent un palais, le Kharge, pour leurs soldats, qui fut habité au XVIII e siècle par les Chéhab, avant la construction de Beit ed-Dine. Au regard de ce passé glorieux, certains habitants de Deir el Kamar considèrent encore aujourd’hui leur ville un peu comme « un centre du monde ».
Orientée au sud au-dessus de la vallée, la petite cité s’organise autour d’une place, le midan, au centre de laquelle se trouve une fontaine aux eaux fraîches auxquelles sont prêtées des vertus bénéfiques. Sur le côté ouest de la place, une petite mosquée à minaret octogonal, construite en 1493 par Fakhreddine, est la plus ancienne du Mont-Liban.
Le kaissarié, souk de la soie, a été réhabilité et abrite aujourd’hui un Centre culturel français dynamique qui organise chaque année, entre autres, des estivales désormais réputées. Avec ses arcades, ses dômes et sa cour carrée, le kaissarié témoigne du fait que Deir El Qamar a été un centre commercial de première importance jusqu’à ce que l’axe Beyrouth-Damas l’emporte et rejette la ville dans les marges des grands courants d’échanges. Cet ensemble est dominé, au flanc de la montagne, par de nombreuses maisons traditionnelles.
Les petites rues, dallées depuis le XVII e siècle, empruntent à l’architecture italienne (Fakhreddine séjourna un temps chez les Médicis). : De l’autre côté de la place, le Sérail, construit au XVIIIe siècle, comporte une magnifique cour dallée se terminant au-dessus de la vallée par une sorte de salon d’été. En entrant à gauche, une pièce de réception conserve des boiseries anciennes de toute beauté. La cheminée de pierre, elle, semble plus récente. Dans la cour, à droite, un escalier abrupt conduit aux toits.
Le palais Baz, de la même époque que le Sérail, ferme la place à l’est. Il fut construit vers 1760 par l’émir Ahmed puis vendu à Gérios Baz qui fut ministre de Béchir II. Le portail, marqueté de marbre et orné de torsades, ouvre sur une cour. Un musée de cire, réalisé par l’émir Baz en collaboration avec le musée Grévin de Paris, offre dans deux salles du palais un panorama de l’histoire du Liban depuis 1512 au travers de figures marquantes, hommes politiques, personnalités religieuses…
Témoignage de cette constante libanaise qu’est la succession ininterrompue de civilisations et d’hommes, Der El Qamar en a charmé plus d’un, dont l’homme de lettres Gérard de Nerval.