Comprendre un pays, c’est aussi plonger dans sa création artistique, qu’il s’agisse de cinéma, de peinture ou d’art dramatique. C’est sans doute pour cela qu’à Beyrouth, le théâtre Monnot pique souvent la curiosité des visiteurs étrangers qui découvrent avec bonheur ce lieu au charme fou. Fort d’une programmation remarquable et éclectique, il propose au public un éclairage pertinent sur le Liban, ses préoccupations, ses souffrances, ses fous-rires aussi.
Parmi les quartiers traditionnels de Beyrouth, celui de Monnot est particulièrement apprécié des locaux comme des touristes. Ici, on déambule, on flâne, au fil de petites rues à caractère traditionnel, où se succèdent petites boutiques, cafés, restaurants et trésors institutionnels : parmi eux, il y a le théâtre Monnot.
On y accède par un escalier qui, depuis la rue, descend vers les guichets et la salle, situés en sous-sol. Les promeneurs venus de l’étranger s’arrêtent fréquemment en haut des marches lors de leurs balades dans la capitale : « Quand ils découvrent le panneau ‘’Théâtre’’ au sommet de l’escalier, ils souhaitent nous visiter », raconte Josyane Boulos, qui a repris la direction de l’établissement en 2022. « Souvent, ils prennent des billets pour vivre l’expérience d’un spectacle. Et ce, même s’il s’agit d’une pièce en arabe ! Mais nous proposons aussi des concerts et des ballets, qui sont universels »,
Né il y a 26 ans, le théâtre Monnot est assez jeune et pourtant, il fait ici figure d’institution. « Il a été créé dans le cadre de l’Université Saint Joseph, institution à part entière », explique la directrice qui, également actrice, décrit souvent l’établissement comme sa deuxième maison. « De plus, les directions précédentes ont conféré à ce théâtre, dès ses débuts, une touche élitiste, avec des productions de haut niveau », ce qui a contribué à cette marque de fabrique institutionnelle.
C’est en avril 2022 que Josyane Boulos reprend la direction du théâtre, à la suite du départ de ses directeurs général et administratif (respectivement Paul Mattar et Ziad Halwani). Elle devient ainsi directrice artistique et administrative de l’établissement, géré par l’association CREAL (Centre de création artistique libanais), qu’elle a fondée avec quatre autres passionnés d’art dramatique : Nadim Chammas, Wajih Akkari, Tania Rizk et Alexandre Najjar. L’association assure aujourd’hui la programmation du théâtre de manière indépendante. « Notre objectif est de nous ouvrir à différents genres », poursuit Josyane Boulos, « et finalement de démocratiser le théâtre, de le proposer à un public le plus large possible. Nous jouons aussi bien du Jean-Paul Sartre, que du vaudeville, des pièces d’auteurs étrangers que celles de dramaturges libanais. »
Mettre en valeur la production et la création locale, c’est précisément l’une des raisons d’être de l’association CREAL. « Soutenir la créativité des jeunes artistes libanais, leur donner un espace de libre expression, c’est aussi un moyen de leur éviter d’avoir à quitter le pays pour travailler », souligne Josyane Boulos.
La créativité artistique est en pleine effervescence au Liban, où les événements culturels s’enchaînent depuis des mois, après des années marquées par le covid, les manifestations, l’explosion du port de Beyrouth (le quartier de Monnot fait partie des zones particulièrement touchées), et la crise financière.
« Le Liban, comme le reste du monde, a soif de culture », poursuit Josyane Boulos. « Une exposition ou une pièce de théâtre, c’est une occasion d’échanger sur autre chose que les difficultés du quotidien. Donner toute sa place à l’art, que l’on crée une œuvre ou que l’on vienne la découvrir, c’est aussi montrer qu’on est toujours là. Bien vivants. » Parmi les derniers exemples en date : l’affluence lors de la soirée littéraire organisée dans le cadre du festival Beyrouth Livres. « Nous pouvons accueillir 260 spectateurs, mais la demande allait bien au-delà, avec une file d’attente impressionnante. Dans ce genre de situation, nous tentons de nous arranger au mieux mais nous devons refuser des gens, notamment pour d’évidentes questions de sécurité. Quoi qu’il en soit, cet engouement fait chaud au cœur. Au beau milieu de la violence environnante... c’est une victoire, vraiment, de surpasser toute cette laideur de tous les jours pour offrir la beauté du théâtre. Les gens ont envie de beauté, de culture. »
Vous pouvez retrouver tous les événements du Théâtre Monnot dans la rubrique Agenda de MOOVTOO.
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